L’habillage des bouteilles de Champagne n’a rien à envier à la haute couture. Coiffe, collerette, muselet et étiquette, vous ne regarderez plus une bouteille de Champagne de la même façon grâce à Dune !
La Cour d’appel de Paris s’est introduite dans le dressing des bouteilles de Champagne en se prononçant sur l’utilisation d’étiquettes et de collerettes destinées à habiller le col de bouteilles de Champagne.
Aujourd’hui, Dune vous propose de découvrir cet arrêt du 10 mars 2023 pour en apprendre davantage sur l’habillage des bouteilles de Champagne.
« Impérial » et collerette : au cœur de la discorde
Si vous êtes amateur de Champagne, vous connaissez l’emblématique cuvée dite « Moët Impérial » issue d’un assemblage de plus de 200 crus.
Cette cuvée est commercialisée par la société MHCS appartenant au groupe LVMH (« MHCS ») et reconnaissable par sa célèbre collerette formée par deux rubans noirs en forme de cravate, qui forment un « X », avec un liseré doré, et un sceau apposé à l’intersection et par l’usage du terme « Impérial » depuis 150 ans.
MHCS est titulaire de la marque verbale française « Impérial » et de plusieurs marques figuratives et semi-figuratives, dont les trois marques ci-dessous :
MHCS reprochait en 2019 à une société allemande concurrente de commercialiser des bouteilles de Champagne comprenant le terme « Hedonist Black Edition – Impérial » et copiant la collerette de sa cuvée « Moët Impérial ». MHCS avait identifié deux autres sociétés françaises auxquelles elle reprochait d’avoir apposé les étiquettes litigieuses sur les bouteilles et de les avoir exportées vers le concurrent allemand.
Une première décision au goût de bouchon
Assignés devant le Tribunal Judiciaire de Paris, le concurrent allemand, la société ayant apposé leurs étiquettes sur les bouteilles et la société les ayant exportées soulevaient la nullité des marques de MHCS et leur déchéance, à savoir leur non-usage (pour un rappel sur la déchéance, voici notre article ici).
Dans son jugement du 26 février 2021, le Tribunal rejetait la nullité et la déchéance mais surtout écartait la contrefaçon de marques. Pour autant, le Tribunal condamnait le concurrent allemand au titre d’actes de parasitisme à payer à MHCS la somme de 50.000 €.
Le Tribunal lui interdisait de poursuivre la commercialisation des bouteilles litigieuses avec les étiquettes associées à la collerette.
Le concurrent allemand s’est satisfait de la décision et n’a pas interjeté appel contrairement à MHCS, qui a fait face devant la Cour d’appel aux sociétés ayant apposé leurs étiquettes sur les bouteilles et les ayant exportées.
Un arrêt qui pétille pour les bouteilles « Moët Impérial »
Dans son arrêt du 10 mars 2023, la Cour confirme que les défendeurs échouent à démontrer l’absence de distinctivité de la marque verbale « Impérial » et des marques composées d’une collerette et leur caractère usuel.
Les défendeurs prétendent qu’en Allemagne, le terme « Imperial » sans accent est utilisé pour désigner une bouteille de 75 cl et qu’il n’est pas utilisé à titre de marque car inséré dans un signe complexe.
La Cour retient la contrefaçon de la marque « Impérial » au motif que l’argument de l’accent est insignifiant alors que les signes en cause se liront de la même manière et sont identiques, sans qu’il soit nécessaire de caractériser un risque de confusion.
Sur l’apposition de la collerette, la Cour retient que les signes ne sont pas identiques et va apprécier l’existence d’un risque de confusion qu’elle confirme en retenant que les collerettes sont destinées à habiller le col d’une bouteille de Champagne et ne constituent pas un simple décor.
Pour retenir la contrefaçon de marque, la Cour retient que ces similitudes sont suffisantes à caractériser un risque de confusion ou d’association dans l’esprit du consommateur, même d’attention assez élevée s’agissant de bouteilles de Champagne.
La Cour interdit la poursuite des agissements contrefaisants sous astreinte de 300 euros par infraction constatée. Elle condamne in solidum les sociétés ayant apposé leurs étiquettes sur les bouteilles et les ayant exportées à payer à MHCS la somme de 30.000 € au titre des actes de contrefaçon (en plus des condamnations qui avaient été prononcées à l’encontre de la société concurrente allemande) et 10.000 € au titre des frais de procédure.