Champagne, Cigarettes et Russie ? La Guerre des noms

droit des marques

On connaît tous les termes AOP et AOC, mais à quoi font-ils référence ? Ils sont censés être gages de qualité ou a minima d’une certaine consistance dans l’élaboration des produits. Peut-on vraiment les protéger ?

L’Appellation d’Origine Protégée (« AOP ») est une appellation européenne créée en 1992 qui établit la qualité et l’origine de certains produits. C’est un signe européen qui protège le nom du produit dans toute l’Union Européenne. L’AOP est attribuée à un produit dont toutes les étapes de production sont réalisées selon un savoir-faire reconnu dans une même aire géographique qui donne ses caractéristiques au produit.

L’Appellation d’Origine Contrôlée (« AOC ») protège la dénomination sur le territoire français. Elle constitue une étape vers l’AOP, il n’est pas possible de bénéficier de l’AOP sans avoir d’AOC.

Les produits relevant de ces signes doivent respecter un cahier des charges précis qui permet de protéger la production.

L’AOC Champagne est très rigoureuse et en permanence optimisée, la rendant très attrayante pour de nombreux producteurs. En effet, les producteurs de vins mousseux ou de produits qui n’ont en apparence aucun lien direct avec le vin issu de la région de la Champagne ont toujours cherché à utiliser sa force d’attraction évocatrice pour dynamiser la vente de leurs propres produits.

Le Comité Champagne est chargé de combattre les contrefaçons et de s’opposer aux utilisations abusives de l’AOC Champagne.

La France a classé ses vins en différentes catégories, selon leurs niveaux de qualité, de réglementation et de contrôle. Les vins à AOC constituent la catégorie la plus élevée de cette échelle de valeurs.

La notoriété du nom Champagne est telle qu’elle fut usurpée par des produits étrangers à l’univers des vins ou des boissons.

La longue lignée de décisions relatives à la protection de l’AOC Champagne, débute en 1984 par la célèbre jurisprudence des cigarettes nommées « Champagne » par la SEITA. Dans une décision du 5 mars 1984, le Tribunal de Grande Instance de Paris juge que les dépôts par la SEITA de marques « Champagne » pour désigner des tabacs et des allumettes peuvent entraîner un risque de dépréciation, de banalisation, d’affaiblissement de la notoriété de l’appellation Champagne, qui s’applique à des produits prestigieux et inimitables.

Autre fait notable récent : la Russie s’est ici démarquée en faisant fi de nos règles. Ainsi, le 2 juillet 2021, une loi russe est venue remettre en question la mainmise des producteurs champenois sur le marché des vins mousseux en Russie. Selon ce texte, l’appellation « Champagne », en russe « Shampanskoe », est désormais uniquement autorisée pour les producteurs de vins russes. Non seulement ce texte contrevient totalement à l’appellation française « AOC champagne », mais encore, les vins importés devront être appelés « vins à bulles », y compris pour les véritables vins champenois, qui se retrouvent dépossédés de leur propre appellation.

En d’autres termes, les vins de Champagne conservent le droit exclusif d’utiliser le mot « Champagne » en caractère latin, mais ils ne peuvent plus s’appeler « Shampanskoe », qui est la traduction de « Champagne » en russe, la traduction russe étant à présent réservée aux vins pétillants russes.

Vous reprendrez bien un verre de Champagne même s’il ne s’agit plus de « Shampanskoe » ? Kamoulox !

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